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Ouverture à la concurrence ferroviaire : l’ART encadre les conditions d’accès aux centres de maintenance

Affaires - Transport
01/04/2025

Le 24 octobre 2024, l’Autorité de régulation des transports (ART) a émis un avis favorable sur les offres de référence de maintenance présentées par les sociétés dédiées de SNCF Voyageurs, dans le cadre de l’ouverture à la concurrence du transport ferroviaire conventionné. Cette étape s’inscrit dans un processus de libéralisation progressive du secteur ferroviaire, déjà amorcé depuis plusieurs années.

Ces sociétés – Sud Azur, Étoile d’Amiens et Loire Océan – ont été créées spécifiquement pour répondre aux appels d’offres régionaux. L’ART s’est prononcée sur leurs offres de référence de maintenance (ORM), en application de l’article L. 2133-5 du Code des transports. Si l’Autorité a validé la structure tarifaire proposée, elle a également émis plusieurs recommandations précises, en particulier pour les horaires de service 2025 et 2026.

Des installations clés, difficilement duplicables

Les centres d’entretien du matériel roulant ferroviaire constituent des infrastructures stratégiques. Leur coût d’implantation est tel qu’ils ne peuvent être aisément reproduits, ce qui crée un enjeu d’accès équitable pour les nouveaux entrants sur le marché. La région Auvergne-Rhône-Alpes a ainsi engagé plus de 70 millions d’euros pour moderniser l’atelier de Chambéry, ou encore 14,7 millions pour la création d’un site à Annemasse.

En raison de ces barrières économiques et techniques, ces centres sont juridiquement qualifiés d’installations de service régulées. Le législateur européen, via la directive 2012/34/UE, transposée en droit français, impose un accès non discriminatoire, transparent et équitable à ces installations, obligation encadrée par l’ART.

Une tarification simplifiée mais perfectible

L’ART a salué la mise en œuvre d’une tarification plus lisible, composée d’un tarif socle pour toute entrée dans un centre de maintenance et d’un tarif complémentaire en fonction des prestations utilisées. Cette simplification répond aux critiques antérieures portant sur le manque de clarté et de cohérence économique des anciens modèles.

Toutefois, l’absence de données fiables reste problématique : la tarification actuelle repose sur des projections, faute d’historique suffisamment détaillé. L’Autorité recommande donc la mise en place d’outils de collecte de données robustes, pour permettre une évaluation plus réaliste des coûts et une meilleure prévisibilité tarifaire.

Parmi les données à suivre figurent :

  • le nombre d’entrées et de sorties de matériel ;
  • le temps d’usage des équipements et installations ;
  • les temps d’intervention des agents ;
  • l’utilisation des installations annexes (vidange des WC, machines à laver).

Une carence notable : les pièces réparables du matériel

Enfin, l’ART pointe une lacune importante : l’absence d’accès aux pièces réparables du matériel (PRM) dans les ORM, alors même que cette demande est forte parmi les concurrents de SNCF Voyageurs. Ces pièces, gérées par la filiale Masteris, restent aujourd’hui hors d’atteinte des autres opérateurs, ce qui limite leur capacité à proposer des offres compétitives.

L’Autorité alerte sur ce point : si une demande formelle devait émerger, elle se réserve le droit de mener une analyse approfondie des modalités d’accès à ces prestations. Elle encourage par ailleurs la mutualisation des besoins entre opérateurs afin de réaliser des économies d’échelle.

L’avis rendu par l’ART, bien qu’approbateur, fixe une feuille de route exigeante pour les sociétés dédiées de SNCF Voyageurs. Il témoigne de la vigilance accrue des régulateurs quant aux conditions d’une ouverture équitable du marché ferroviaire français.