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Le trajet domicile-travail et le temps de travail effectif : précisions apportées par la Cour de cassation

Affaires - Transport
23/01/2025

Dans un arrêt du 15 janvier 2025, la chambre sociale de la Cour de cassation s’est penchée sur la question des trajets domicile-travail et leur qualification comme temps de travail effectif. Cet arrêt apporte des éclairages importants pour les employeurs et les salariés concernant la gestion des déplacements professionnels.

Rappel des faits de l’affaire

Un salarié, conducteur routier, contestait le changement de son lieu de prise de service, suite au déménagement des locaux d’une entreprise cliente. L’employeur avait proposé une indemnisation kilométrique de 20 euros par jour pendant un an, offre jugée insuffisante par le salarié. Ce dernier réclamait en outre le remboursement intégral des frais professionnels.

La Cour d’appel de Nîmes avait déclaré que les trajets domicile-travail, réalisés avec le véhicule personnel du salarié jusqu'à un lieu de prise de service unique, ne constituaient pas du temps de travail effectif. Le salarié s’était pourvu en cassation.

Les principes posés par la Cour de cassation

La Cour de cassation a confirmé la décision de la Cour d’appel, rappelant que les trajets domicile-travail ne sont pas systématiquement considérés comme du temps de travail effectif. Cette qualification dépend de plusieurs critères précisés par la jurisprudence et les règlements européens :

  • Cas particuliers reconnus : Conformément au règlement européen n° 561/2006 (article 9.2), certains trajets peuvent être considérés comme du temps de travail effectif lorsque des situations particulières, telles que l’utilisation d’un ferry ou d’un train avec couchette, se présentent.
  • Notion de lieu de rattachement concret : Inspirée par la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), cette notion désigne le lieu d’où le salarié effectue régulièrement ses services et vers lequel il retourne sans être sous l’autorité directe de l’employeur pendant le trajet. Ainsi, lorsque le salarié utilise son véhicule personnel pour se rendre sur un lieu de prise de service unique, ce trajet n’est pas assimilé à du temps de travail effectif.

Analyse de la décision

La Cour de cassation a approuvé la démarche de l’employeur, qui avait pris des mesures adaptées suite au déménagement de l’entreprise cliente en proposant une indemnisation kilométrique. Elle a également validé la démarche de la Cour d’appel de Nîmes, qui avait analysé que le nouveau lieu de prise de service constituait bien le lieu de rattachement concret du salarié.

Cette décision confirme que les frais engagés pour les trajets domicile-travail doivent être considérés comme des frais professionnels lorsque le lieu de prise de service est modifié à l’initiative de l’employeur. Toutefois, cette qualification n’entraîne pas automatiquement la reconnaissance de ces trajets comme du temps de travail effectif.

Impact pour les employeurs et les salariés

Cet arrêt est un rappel important des règles encadrant les trajets domicile-travail. Les employeurs doivent veiller à respecter leurs obligations en matière de remboursement des frais professionnels en cas de modification du lieu de travail. Cependant, ils ne sont pas tenus de considérer ces trajets comme du temps de travail effectif, sauf circonstances particulières.

Pour les salariés, cette jurisprudence invite à bien comprendre les critères encadrant cette notion. En cas de désaccord, la preuve des conditions particulières pouvant requalifier ces trajets reste essentielle.

En conclusion, cette décision de la Cour de cassation consolide les principes juridiques entourant la notion de temps de travail effectif et son application aux trajets domicile-travail. Elle souligne l’importance d’une analyse contextuelle et pragmatique des situations afin de garantir un équilibre entre les droits des salariés et les intérêts des employeurs.